vendredi 13 avril 2018

Un chapitre d'ouvrage sur le marketing et l'économie de la WWE


crédit photo WWE
Le livre Marketing du sport, une vision internationale coordonné par Michel Desbordes et André Richelieu va paraitre ce mois-ci dans la collection Management et Sport de De Boeck. J'y reprends un  chapitre initialement paru en 2011 dans Néo-marketing du sport, regards croisés entre Europe et Amérique du Nord coordonné par les mêmes éditeurs. Le chapitre est bien évidement actualisé et augmenté.  Les nombreuses données sur le modèle économique sont mise à jour, la bibliographie est plus récente et de nouvelles dimensions de l'activité de la WWE sont dorénavant traitées (les médias sociaux, la rémunération des athlètes). 



je livre ici un court extrait du chapitre à paraitre:


L’appropriation des fans de la marque WWE va jusqu’à la conception du produit (Fansourcing). La démarche de la WWE est d’autant plus intéressante que la fédération est généralement réticente à autoriser les fans à intervenir sur le produit. Sur son site, la WWE explicite : « Please do not send or e-mail any materials (including scripts, screenplays, story-lines, ideas, music, business proposals, marketing concepts, etc.) having to do with character development, story-lines or in-ring activities. WWE does not consider or examine these materials[1]. » Il n’y a plus seulement co-production du spectacle mais aussi co-élaboration. Ainsi, le pay per view « Cyber Sunday » permettait aux fans de voter sur le site de la WWE pour les stipulations des matchs, les catcheurs, le titre mis en jeu[2]. Jonathan Zerden, alors VP Interactive Technology, précisait : « We use customer feedback to impact our story lines and for marketing. It enables us to surround the customer with 360 degrees of marketing. We get to see how they interact with mobile platforms, how they interact with us, how they interact with their arena, and how they interact with their cable company[3]. » Lancé en 2018, le programme WWE Mixed Match Challenge élève le fan au rang de consom’acteur et consom’auteur. Diffusé sur Facebook Watch, il peut intéragir avec les superstars, choisir les stipulations des combats et même composer des équipes. Le fan n’est plus passif et spectateur d’un spectacle sur lequel il n’aurait aucune emprise. 

(...)

Si la WWE est parvenue à devenir une marque mondiale il ne faut pas pour autant oublier que ses tentatives de diversification entreprises au début des années 2000 se sont soldées par des échecs. The World, un restaurant thématique ouvert à Time Square (New York) en 1999 a fermé ses portes en 2003 au motif que la fédération préfère « reallocating resources to the continued growth of our global business, rather than focusing on a single, site-specific and local project[5]. » Fondée en 2000 comme une joint venture entre la chaîne NBC et la WWE, la XFL était une ligue de football professionnel opérant dès la fin de la saison NFL avec pour objectif de cibler les fans de foot et les fans de catch. Si l’affluence moyenne est de 23 000 spectateurs par match, les audiences chutent rapidement. Initié par un promoteur de catch, le produit n’est pas apparu comme crédible de sorte que la XFL a cessé son activité après une seule saison. L’échec est tel que la XFL a été classée comme le second plus grand flop de l’histoire du sport par ESPN[6]

Cela dit, la WWE domine le marché du catch en ayant opéré une mutation « From margin to mainstream. » Devenue un spectacle calibré pour une audience familiale, la WWE élargit sa base de clients potentiels mais perd en contrepartie une base de fans masculins plus âgés qui se ré-orientent sur les spectacles d’arts martiaux mixtes organisés par l’UFC. 

Bénéficiant de plusieurs canaux de distribution (spectacles, télévision, plateforme WWE Network, médias sociaux), la WWE dispose d’une grande agilité et, selon les événements, est en mesure de faire varier ses objectifs de la monétisation et la valorisation. Michelle Wilson, la directrice marketing de la WWE explique : « We’ve developed metrics where we decide where to put a piece of content. We literally have a group where we sit in a room, and we say "This particular show, is it about brand building, and therefore, do we need to build the greatest reach? Is it about economics, and do we want to monetize it? Or is it about fan engagement?" We kind of always think about engagement, monetization and reach. [7]» 

Le succès de la WWE s’explique par le positionnement singulier de l’entreprise à la confluence de quatre types de marketing : 
  • Marketing de contenu : la WWE produit des spectacles, des images, des émotions déclinés sur plusieurs supports. 
  • Marketing expérientiel : le spectacle de la WWE habillé de stimuli. L’histoire racontée des rivalités entre catcheurs fait l’objet d’une théâtralisation importante. 
  • Marketing relationnel : la WWE cherche à comprendre au mieux les aspirations de ses fans pour produire le spectacle le plus adapté, impliquant à l’occasion son public dans la conception du produit. 
  • Marketing digital : la WWE a construit une communauté de fans engagés sur les médias sociaux qu’elle alimente en contenu exclusif.


[1] corporate.wwe.com
[2] Cyber Sunday s’est déroulé de 2004 (appellé cette année-là « Taboo Tuesday ») à 2008. Depuis 2010, la WWE a mis en place le concept similaire de « Viewer's Choice » pour l’émission Raw.
[3] WWE wrestles with customer feedback marketing, de John Gaffney, le 03 mai 2007 sur SearchCRM.com
[5] World Wrestling Entertainment, Inc. to close restaurant, le 25 février 2003, 2003 news sur http://corporate.wwe.com
[6] ESPN25: The 25 Biggest Sports Flops, ESPN.com
[7] « 'We're ahead of the curve': WWE's marketing chief says the wrestling brand is already where big TV networks want to be in terms of building a data-driven streaming service » publié le 11 janvier 2018 sur businessinsider.fr/us/

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