Le festival La Lucarne, c'est la semaine prochaine du 3 au 5 juin. La deuxième édition est parrainée par Stéphane Meunier, réalisateur du documentaire culte "les yeux dans les Bleus". 600 personnes sont attendues au Max Linder Panorama pour la soirée d'ouverture animée par Hervé Mathoux et Julien Cazarre. Bref, un événement déjà incontournable pour les cinéphiles et les amateurs de football. J'ai interviewé les organisateurs du festival.
Le Festival est organisée par l'association Petit pont et Grand Ecran. Qui sont donc les personnes impliquées dans ce projet (vous venez de la culture, des médias, du sport?) comment est né ce projet?
À la base, le festival est né au cours de l’année 2012 de la volonté d’une bande d’amis, passionnés de football et de cinéma et qui ont imaginé un festival alliant ces deux passions. L’un des créateurs du festival participait par ailleurs depuis plusieurs années à l’organisation du festival 11mm à Berlin, premier festival du film de football à avoir été créé, ce qui a permis à La Lucarne de bénéficier d’une expérience non négligeable.
À l’origine du projet, on retrouve donc une quinzaine de personnes âgés de 25 à 32 ans, travaillant dans le sport, le cinéma, et les médias. Pour cette deuxième édition du festival, on est quatre à travailler particulièrement sur l’organisation du festival.
Vous avez fait appel à Kiss Kiss Bank Bank et différents partenaires. Est-ce simple de financer un tel événement qui mêle sport et culture?
Tout d’abord, il faut bien avoir en tête que, si la collecte de dons obtenue grâce à Kiss Kiss Bank Bank nous permettrait d’améliorer certains aspects du festival, et notamment d’inviter davantage d’intervenants étrangers, ce que nous ne sommes pas véritablement en mesure de faire pour le moment, elle ne représente pas une rentrée d’argent vitale pour La Lucarne.
Plus généralement, nous avons la chance de pouvoir compter sur la Fondation d’Art Oxylane (la fondation Decathlon), qui est notre partenaire principal et qui représente le soutien essentiel au festival. La Lucarne a également plusieurs partenaires Médias, comme Canal +, qui met notamment à disposition certains de ses présentateurs durant le festival, Radio Nova, avec qui un projet d’émission radio en direct du Point Éphémère est en discussion, ou encore So Foot, qui relaie notre évènement. On bénéfice également de soutiens de la Mairie de Paris et de la FFF.
Au final, après avoir longuement été catalogué comme un sport de «rustres» pendant de nombreuses années, on peut observer un changement des mentalités petit à petit. Contrairement à la société italienne notamment au sein de laquelle les artistes ont depuis bien longtemps eu un rapport décomplexé au football, ça a toujours été plus difficile en France. Mais depuis quelques années, de plus en plus d’intellectuels et d’artistes saisissent la dimension dramatique du football pour en parler au sein de leurs travaux et créations. Et de ce fait, on peut dire que le football devient - ou est en train de devenir - «tendance», ce qui forcément permet d’attirer les regards de nouveaux partenaires et donc d’éventuels investisseurs.
La première édition a d'emblée été un succès avec une couverture presse/média importante. Comment l'expliquez vous? Est-ce parce que la production cinématographique disponible sur cette thématique laissait présager un succès? Ou bien parce que finalement le grand pont entre football et culture est plus facile (peut-être plus encore depuis le succès de so-foot)?
En premier lieu, nous pensons que c’est l’aspect atypique de La Lucarne qui a attiré le public et les médias, et qui a permis à la première édition du festival de connaître un succès important.
Ensuite, au niveau de la production cinématographique sur le football, s’il existe effectivement beaucoup de films sur le sujet, c’est surtout l’association de deux domaines très différents qui attire le public selon nous. Le fait de montrer le football à travers un prisme différent joue clairement un rôle.
On ne peut également pas nier le fait que la présence d’intervenants connus du grand public, que ce soit des présentateurs de Canal +, des réalisateurs, ou encore des anciens joueurs, permet d’attirer plus facilement.
C’est aussi ça qui est intéressant avec La Lucarne : allier le sport le plus populaire à la sortie culturelle la plus populaire, tout en proposant un regard original sur cette association.
Cette année, le festival lance le premier concours de courts métrages. Qu'en attendez vous?
Pour nous, ce concours de courts métrages doit représenter une ouverture vers des projets originaux et inédits. Contrairement à des longs métrages devant répondre à des contraintes financières importantes, les réalisateurs de courts sont totalement libres en ce qui concerne leurs choix artistiques.
Bien sûr, ils doivent composer, plus qu’avec des contraintes, avec certaines limites, également financières. On sait que l’un des problèmes dont souffrent les films mettant en scène le football est la difficulté pour ces projets de retranscrire ce que pouvait connaître le téléspectateur devant un match retransmis à la télévision. Ce problème est clairement lié à un manque de moyens comparé à ceux mis en oeuvre par les chaînes de télévision, et sont encore plus vrais pour les courts métrages.
Ce qu’on attend de ces projets, c’est qu’ils nous proposent autre chose, qu’ils nous surprennent par leur originalité.
Hervé Mathoux et Julien Cazarre vont animer la soirée d'ouverture. Mais le monde du cinéma se mobilise t-il? Peut-on imaginer une soirée "Les Seigneurs" disséqués par Xavier Leherpeur et Jean-Marc Lalanne?
On assiste à deux situations assez différentes entre les mondes du cinéma et du sport par rapport à La Lucarne.
En ce qui concerne le cinéma, des réalisateurs et acteurs semblent très intéressés par La Lucarne, de par la passion qu’ils vouent à ce sport et/ou leurs projets en lien avec le football. On a par exemple accueilli Bertrand Bonello en 2013 , qui était également le parrain de cette première édition.
Par contre, il est plus difficile d’attirer le regard des critiques cinéma, qui ne ne semblent pas vraiment intéressés par les films traitant de football, sans doute de par le côté assez classique de la mise en scène de ces films.
Il serait cependant faux d’imaginer qu’il est plus facile de mobiliser les professionnels du football. Si on peut compter sur certains journalistes et présentateurs sportifs reconnus, c’est notamment en raison de notre partenariat avec Canal +. De façon spontanée, les journalistes et blogueurs sportifs s’intéressent aussi à La Lucarne, mais il est toutefois extrêmement difficile d’inviter des footballeurs professionnels. On peut déjà imaginer qu’il existe plus de réalisateurs/acteurs fans de football que l’inverse. De plus, les joueurs demeurent assez protégés et donc plus difficile à contacter. À titre d’exemple, on a brièvement été en contact avec l’acteur Viggo Mortensen qui n’a pas mis plus de 15 minutes à répondre à notre mail. On a du mal à imaginer que le contact aurait été aussi simple avec Frank Lampard par exemple...
On n’est pas spécialement d’accord avec ça. Bien que la comédie reste un genre très souvent associé au football, il ne faut pas oublier que les films de football récents sont composés de genres très variés. On peut citer pleins de films français récents qui ne sont pas des comédies : «Les rayures du Zèbre», «Comme un lion», ou encore «Les petits princes». En général, les films de football alternent entre drames et comédies. Après, clairement les films de football qui marquent le plus les esprits et qui rencontrent les succès les plus importants demeurent des comédies, c’est certain. Mais c’est assez facilement compréhensible puisque la comédie est le genre qui rencontre les plus grands succès en salle depuis plusieurs années avec «Bienvenue chez les Ch’tis», «Intouchables», ou encore plus récemment «Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu ?». On peut ainsi aisément comprendre que des producteurs aient envie de produire des films alliant LE genre à succès et LE sport le plus populaire. «Les seigneurs» en est d’ailleurs le parfait exemple, qui plus est en intégrant les humoristes les plus populaires du moment.
Aux cinéphiles récalcitrants à l'objet foot, quel(s) film(s) recommanderiez vous de voir absolument (attention, il est interdit de citer Coup de tête!)
Deux films seraient à citer en particulier selon nous : «Looking for Eric» de Ken Loach, qui a vraiment su saisir l’émotion particulière et ce que peut représenter le football pour les supporters, et «Les rebelles du foot», un documentaire réalisé par Gilles Rof et Gilles Pérez, sur l’engagement hors du terrain de cinq footballeurs mythiques, parmi lesquels on retrouve bien évidemment Eric Cantona ou encore le brésilien Socrates. On avait d’ailleurs diffusé ce film en ouverture pour la première édition de La Lucarne.
Dans un genre totalement différent, «The Lost World Cup», le film qui sera projeté en ouverture de notre deuxième édition cette fois, vaut également le détour et représente un film de football unique.
On aurait également pu citer «El camino de San Diego» ou encore «The Damned United» par exemple.
Avec le succès que la première édition a connu l’année précédente, on a décidé de proposer un festival s’étalant sur une durée de 6 jours cette année (du 3 au 8 juin 2014 donc), contre 4 l’année dernière. Cela nous permettra notamment de proposer plus de films et de proposer de nouvelles choses, comme la soirée Courts Métrages du 4 juin à L’Européen qu’on a déjà évoqué précédemment.
Sur ces 6 jours, il y aura donc la première soirée au Max Linder Panorama le mardi 3 juin, avec la projection de l’excellent film italien «The Lost World Cup», en présence des deux réalisateurs. Comme on a pu le dire précédemment, il y aura la soirée Courts Métrages le 4 juin au théâtre L’Européen, puis du 5 au 8 le reste du festival au Point Éphémère, qui accueillera non seulement des projections de films, mais bien d’autres choses. Le public pourra ainsi accéder à une exposition d’oeuvres autour du football réalisées par différents artistes, dont Tom de Pékin, le dessinateur de l’affiche du film «L’inconnu du Lac», assister à un débat philosophique le vendredi 6 à 18h, ou encore profiter d’une soirée brésilienne le samedi 7 à partir de 22h30, à la suite de la projection du film «Une famille brésilienne».
En ce qui concerne la non-unité de lieu, on estime que cela ne pose pas de problème en particulier. Notre volonté était vraiment de proposer des choses différentes au cours de cette édition, et cela passe par des lieux différents. Si les deux premières «grandes» soirées du festival au Max Linder Panorama et à L’Européen se veulent des soirées de cinéma, dans des lieux symboliques parisiens de culture, le Point Éphémère représentera davantage un lieu de passage, avec l’exposition en entrée libre, son vernissage, le débat, etc...
Concernant la programmation, on a vraiment voulu s’orienter vers un festival à l’image de la Coupe du Monde à venir, à savoir de l’exotisme et du Brésil ! On retrouvera ainsi au programme des films aux sujets très internationaux : Brésil, Bhoutan, Montserrat, les Samoa américaines, Belgique, France, Italie, Argentine, etc...Bref une sorte de Coupe du Monde des films.
On voulait également proposer une édition un peu en marge du football classique et professionnel, avec une mise en avant d’un esprit convivial et davantage «amateur», avec notamment les projections des documentaires «L’autre finale» et «The Other Final», suivant le quotidien des pires équipes nationales. Le point d’orgue du festival sera par ailleurs la projection le dimanche 8 à 17h45 du documentaire Enraciné, produit par Canal +, revenant sur la carrière du mythique Guy Roux, qui sera d’ailleurs présent pour l’occasion. Et rien que pour cela, cela vaut le coup de prendre ses billets pour cette 2ème édition de La Lucarne !
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